Dampierre-sur-Salon : étape n°14 – Ma via Francigena

De Champlitte à Dampierre-sur-Salon
De Champlitte à Dampierre-sur-Salon

Dimanche 15 septembre.
Quinzième jour : Rome est à 1347 kilomètres.

J’ai quitté Champlitte vers neuf heures. L’addition était salée, chambre et repas, quatre-vingt-dix euros ! À la sortie de la ville il y avait un autre hôtel, l’Hôtel Henri IV, dont j’ai consulté les tarifs dans l’entrée, ils étaient équivalents donc pas de regrets. Même dans les hôtels, le fait d’être pèlerin, de plus vers Rome, déclenche de la sympathie, les gens s’intéressent et si j’étais un peu plus entreprenant, si je ne me contentais pas de répondre juste aux questions qu’on me pose sans doute pourrait-on avoir des discussions plus approfondies. À la fin du voyage, une fois arrivé à Rome, c’est sûr, comme les apôtres j’aurai le don de la parole.

Un abri pour mettre ses guêtres
Un abri pour mettre ses guêtres

Dix heures. Il pleut. Beaucoup. À l’abri d’un pont je m’équipe de guêtres tout comme lors de mon arrivée à Compostelle par la Via de la Plata, même temps pourri et même problème au niveau du col de cette cape que j’ai eu la bêtise de reprendre pour ce voyage. Le foulard noué autour du cou suffira-t-il à assurer l’étanchéité ?

Ce matin vu le temps, j’ai renoncé à la visite du château de Champlitte, j’ai eu peur qu’il y ait la queue comme c’est souvent le cas en région parisienne lors des Journées du Patrimoine.

Balisage de la Via Francigena
Balisage de la Via Francigena

Aujourd’hui je ne finasse pas, je suis l’itinéraire proposé par mon guide. Il n’y a qu’à suivre le balisage de la via Francigena, le plus souvent des flèches en peinture jaune accompagnées parfois d’un petit pèlerin de la même couleur. Pour le moment les chemins empruntés sont plats et ne glissent pas avec parfois des herbes hautes d’où l’utilité des guêtres.

À l’hôtel ce matin la patronne m’a appris que devant moi marchaient deux Hollandais, un père et sa fille qui l’avait rejoint pour quelques jours.

Lavoir à Neuvelle-les-Champlitte
Lavoir à Neuvelle-les-Champlitte

Un peu après dix heures un beau lavoir à Neuvelle-les-Champlitte. A onze heures c’est le tour de Framont lui aussi avec son lavoir, ils foisonnent dans la région. La pluie s’est calmée. Malgré l’absence de soleil les paysages ont beaucoup de charme. C’est paisible. Un chevreuil traverse le chemin devant moi.

Je n’ai toujours pas mal au dos, c’est un vrai miracle, ça change vraiment la vie. Après ma chute sur l’épaule fin août, j’ai eu peur d’être obligé de reporter cette aventure, j’ai confié ma carcasse à un ostéopathe qui a fait du bon boulot. J’avoue qu’au début j’étais un peu inquiet, il me pétrissait comme de la pâte à modeler, je serrais les dents, mais le résultat est là. Merci.

Pause casse-croûte
Pause casse-croûte

Un peu avant midi, après Achey, arrêt pour un casse-croûte à l’abri d’un tas de bûches, cela devient un rite. Même menu qu’hier. Il y a bien quelques gouttes mais c’est supportable d’autant plus qu’une guêpe me tient compagnie, elle veut absolument partager ce succulent repas.

Peut-être que certains d’entre vous ont remarqué quelques anachronismes dans mon récit, par exemple des citations d’ouvrages qui n’étaient pas encore parus lors de ce voyage. Comme lors de mes précédentes marches vers Compostelle j’ai confié mes impressions de voyages à un dictaphone qui me permet également d’enregistrer des sons, des bruits, pouvant illustrer cette aventure : volées de cloches, cris d’animaux, orgues dans les églises, orchestres locaux… Ainsi pas besoin d’essayer de se rappeler le soir tel ou tel détail de la journée, ils sont tous mémorisés au fil de mon avancée. Par contre, de retour à la maison il faut transcrire toutes ces notes sur papier pour en tirer un récit cohérent et lisible, celui que vous êtes en train de lire. Le son n’est pas toujours fameux (passages de voitures, la pluie, le vent…) et c’est parfois très laborieux. Du coup, il faut bien l’avouer, j’ai traîné des pieds dans cette marche virtuelle. Mais, vive le confinement, j’ai repris le fil de cette narration et je vais essayer de combler cette pause de près de sept ans entre deux étapes ! Donc, pas de temps à perdre, en route ! Soyons transgressifs, franchissons en pensée cet horizon virtuel d’un kilomètre de rayon dans lequel le virus nous enferme !

Château de Montot
Château de Montot

Ici aussi il faut y aller, la pluie se fait plus présente et la guêpe m’a abandonné après s’être emparée d’une bouchée de cette délicieuse saucisse sèche. Aucune raison de s’attarder.

Petit détour par Montot et son très intéressant château moyenâgeux transformé en ferme.

J’arrive au gîte de « La Tour des Moines » à Dampierre-sur-Salon vers 14 h 15. C’est une grande belle maison. Dans la chambre des pèlerins il y a trois lits. Mon hôte, assez âgé, me fait penser à mon père. À mon arrivée il m’offre à boire : café, bière ou jus d’orange ? En ce qui concerne le café depuis quelques jours pour des raisons de santé il le prend sans sucre et commence juste à s’habituer. Pour l’encourager j’opte pour un café… sans sucre.

Le récit de mon Chemin de Compostelle au départ du Puy-en-Velay ainsi que celui par le Camino Norte sont désormais disponibles en livres vous pouvez les découvrir ICI.

Dampierre-sur-Salon
Dampierre-sur-Salon

Je l’interroge sur le Hollandais et sa fille : ils sont passés il y a deux jours. Quelques jours plus tôt c’étaient deux Québecois. En tout il a reçu quarante pèlerins cette année et à Besançon où tout le monde converge il y en aurait deux cent-cinquante à trois cents par an : ce n’est pas encore la foule. Les Canadiens qui avaient également fait le Chemin de Compostelle lui avaient raconté combien leur retour au pays avait été difficile surtout au niveau de l’ajustement avec leur entourage. Je confirme, mais ça s’atténue au fur et à mesure des voyages.

Comme convenu à quinze heures avec sa femme ils vont me laisser pour aller à Champlitte profiter de la Journée du Patrimoine, ils connaissent bien le coin, mais c’est l’occasion de raviver des souvenirs.

Gîte de la Tour des moines
Gîte de la Tour des moines

Moi aussi des souvenirs me reviennent, chez Ramon le matin en partant j’avais vu par hasard leur chambre, José son cousin dormait sur un radeau pneumatique renversé pour me laisser le canapé-lit dans la salle de séjour. Honte sur moi.

La pluie a repris, je n’ai pas envie de ressortir. Je vais glandouiller, peut-être faire un article sur mon blog, ou tout bêtement piquer un petit roupillon.

Pour demain j’ai réservé à Gy au « Gîte de la Fontaine » qui fait accueil pèlerin pour vingt-cinq euros, repas du soir et petit-déjeuner compris ! Les jours se suivent et ne se ressemblent pas. Il va m’en falloir beaucoup des comme ça pour rééquilibrer mon budget. Ils n‘ouvrent qu’à dix-huit heures, sans doute des gens qui font cela en plus de leur travail.

Un repas royal
Un repas royal

Je viens de terminer le plateau-repas que m’a confectionné mon hôte : deux tomates du jardin, bien goûteuses, une tranche de jambon épaisse comme on n’en fait plus chez nous, des pâtes que j’ai fait cuire, un bol de fromage râpé, il y avait aussi une bouteille de sauce bolognaise que je n’ai pas utilisée, du fromage et une pomme toute cabossée sans doute une production locale, pas calibrée pour les grandes surfaces, excellente elle aussi, et, une bouteille de Bordeaux. Royal ! Après le repas, mon hôte est repassé me voir. On a discuté un peu, avant sa retraite il était transporteur ce qui lui vaut quelques soucis avec son dos à cause du camion et une hanche qui commence à hurler. Mon ostéopathe est un peu loin, dommage.

Je reçois un SMS d’Agnès qui s’enquiert de savoir si mon enthousiasme est persistant ou non.

En me préparant pour me coucher je m’aperçois que ma chemise était boutonnée en décalé, je me demande ce que mon hôte a pensé de mon état mental.

437 kilomètres parcourus depuis chez moi dont 17 aujourd’hui.

Ci-dessous une galerie de photos, d’éventuelles précisions sur des curiosités locales, la navigation vers les étapes suivantes ou précédentes et la possibilité de déposer un commentaire.

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