Vers Bordeaux sur la voie de Tours – Mes Chemins de Compostelle

Mercredi 9 septembre,
22e étape : Saint-Jacques-de-Compostelle est à 1176 kilomètres

Bordeaux
De Saint-Martin-la-Caussade à Bordeaux

6h20, je quitte le gîte municipal de Saint-Martin-Lacaussade pour aller prendre le bac de 7h30 à Blaye. Notre hôtesse nous a annoncé qu’il fallait compter trois-quarts d’heure, j’ai le temps, j’étais prêt, je suis parti.

Il fait nuit, le ciel est rempli d’étoiles, il fait doux, je n’ai pas froid aux bras. Je suis la grand-route qui n’est pas encore trop fréquentée. C’est éclairé de loin en loin mais j’ai prévu la lampe frontale au cas où. Aujourd’hui j’attaque ma 4ème semaine.

Ce matin j’avais mis le réveil à 5h45 mais à 5h30 j’étais éveillé, j’ai neutralisé la sonnerie pour ne pas déranger Monique et je me suis levé de peur de me rendormir. Depuis plusieurs nuits je me réveille dans ces eaux là, même parfois avant, sans doute parce qu’on se couche tôt, hier avant 9h30. A 6h Monique s’est levée à son tour, nous nous sommes souhaité « Buen Camino » et peut-être à plus tard sur le Chemin, elle prendra le bac suivant.

J’arrive au pied de la citadelle sur le chemin de la basilique Saint-Romain. J’en distingue à peine les formes, la visite sera pour une autre fois.

7h me voilà devant l’embarcadère pour Lamarque face à Blaye de l’autre côté de la Gironde, une demi-heure à attendre. Pas besoin de réserver, on paye à bord, même pour les voitures, mais peut-être est-ce une disposition pour la basse saison. La traversée prend de 20 à 30 minutes selon la marée.

7h10 les barrières s’ouvrent, le bac vient de lancer ses moteurs, il y a maintenant une quinzaine de voitures, je suis pour le moment le seul piéton. Un coup de sirène retentit, j’y vais.

7h28 je suis à bord les rampes d’accès viennent d’être levées nous allons partir.

7h30 ça y est, le «Côte de Blaye» s’éloigne du quai !

Invitation au voyage :

 

La traversée est splendide avec un magnifique lever de soleil sur la Gironde, le temps est très clair, il fait très doux, je reste en chemisette.

7h48 c’est fini, à peine le temps d’en profiter, bon, j’arrête de rêvasser, il faut y aller, à moi la traversée du Médoc.

9h15 le temps se couvre. Je viens de faire une pause «technique», ce n’est pas ce que vous pensez, j’ai remplacé les embouts plastiques de l’armature métallique du sac à dos par plusieurs couches d’albuplast : plus un bruit … jusqu’à la prochaine fois évidemment, je ne me leurre pas, mais je savoure ce silence même s’il n’est que provisoire. Il faudra quand même que je surveille si le métal ne perce pas le tissu. Plus tard je m’apercevrai que c’est ici lors de cette intervention digne des 24h du Mans que j’ai oublié ma pince à épiler dont je me suis servi pour extraire ces fameux embouts : dégât collatéral. Il fait doux, mais humide, les pages du guide sont toutes molles. C’est la lande, c’est désert et un peu lugubre. Je ne croise personne à l’exception d’une femme en vélo, il y a des dames aventureuses.

10h10 arrivée à Margaux. La traversée des célèbres vignes du Médoc est un peu hasardeuse, le chemin un peu incertain, heureusement le château d’eau sert de repère. Le ciel est de plus en plus gris mais il fait toujours très doux. Je m’achète un petit sandwich.

11h30 je suis à Arsac où il n’y a pratiquement rien. Je voulais refaire le plein d’eau mais je n’en ai pas trouvée. Pas de panique, il m’en reste assez. Il commence quand même à faire très chaud malgré le ciel couvert.

13h10 j’atteins Le Pian-Medoc après un arrêt casse-croute d’une bonne demi-heure. Depuis Arsac ce ne fût pratiquement que du goudron sur des routes assez larges, pas très passantes, mais où les voitures vont vite. Je n’ai plus d’eau. Tous les magasins sont fermés. Pas un chat pour en demander. Derrière la mairie une pancarte indique «Services techniques», je m’y aventure et miracle au milieu d’un grand mur un minuscule robinet : je refais le plein.

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14h45 Blanquefort, je ne m’attarde pas. Jusqu’à présent le trajet suivait beaucoup de petits chemins sympathiques mais changement d’ambiance, désormais c’est la ville, ce sera comme cela jusqu’à Bordeaux.

16h15 ça y est, je suis dans Bordeaux accueilli par le cirque Pinder.

Les trottoirs on été aménagés pour créer des places de stationnement mais sur le peu qui reste il y a des poubelles, des poteaux électriques ou de signalisation : plus rien pour le piéton et encore moins pour les poussettes.

16h30 je déguste une pomme dans le parc bordelais. A la sortie du parc je suis interpellé par un homme (qui me semble) un peu plus âgé que moi ; il me demande si je « fais le Chemin » ; lui l’a déjà fait par le camino frances, par la côte, bref sous toutes les coutures, encore un récidiviste.

17h10 je sors de l’église Saint-Seurin où il y a le tombeau de Saint Fort, ça peut toujours être utile. Une dame très accueillante appose un petit tampon sur ma crédentiale.

17h30 je suis devant la cathédrale Saint-André. Je ne sais pas si c’est les endorphines mais je suis habillé comme un gueux et je me sens l’étoffe d’un chevalier. Cette impression me rappelle l’arrivée sur Burgos où j’avais éprouvé la même sensation d’énergie joyeuse (je doute que l’arrivée en bus puisse procurer le même effet).

Nous sommes le 09 09 09, c’est un jour vraiment spécial d’autant plus que ce serait l’anniversaire de mon père. J’ai fait un nombre incalculable de fois l’aller-retour entre Bordeaux et la région parisienne, en voiture, en train, en stop, en avion, y arriver ainsi, à pied, me remplit d’émotion. Je pense à tous ceux qui auraient été heureux de m’y accueillir. J’appelle Hélène pour partager l’instant.

Dans la cathédrale quelqu’un s’approche de moi et me demande si je suis un pèlerin, j’acquiesce, il m’invite à le suivre et me voilà dans les coulisses où ma crédentiale hérite d’un nouveau tampon : deux cachets pour Bordeaux, il fallait bien ça. Sur le parvis un homme m’aborde, il s’occupe d’une association jacquaire dans les Landes. Cette année avec la tempête il n’a pas pu partir, il a prévu de remettre ça à l’année prochaine, par le camino norte, mais ce sera une année jacquaire et il a peur qu’il y ait beaucoup de monde.

Je me sens en super forme c’est décidé je vais continuer à pied jusqu’à La Bastide. En route vers le pont de Pierre. Demain je vais me laisser chouchouter avant de repartir pour les quelque 1100 km qui restent à parcourir.

18h15 je suis chez ma fille, ma petite-fille m’accueille, ce soir son papa sera là, une bien belle journée.

666 kilomètres parcourus depuis Auffargis

 

4 réflexions au sujet de “Vers Bordeaux sur la voie de Tours – Mes Chemins de Compostelle”

  1. RE : Besoin de renseignements
    Bonjour Virginie,
    Pour la crédentiale vous pouvez vous la procurer au près d’associations de pèlerins ou la commander par Internet au près de l’ACIR (il y a un lien dans mes « Ressources »).
    A mon avis il est inutile de s’encombrer de carte, le mieux c’est de se procurer un guide qui décrit le Chemin avec des renseignements sur les hébergements et les points d’intérêt touristique. Il y en a plusieurs : Edition Lepère, Rando Edition, …Ils ont tous leurs avantages et inconvénients. Un bon critère de choix : celui qui est le plus récent, donc en principe le plus à jour. Dans tous les cas vous pouvez compléter ces informations par des recherches sur Internet et en interrogeant, avant de partir, les associations jacquaires des départements traversées.
    A Poitiers le Chemin démarre traditionnellement sur le parvis de Notre Dame la Grande.
    Pour ce qui est du balisage il est dans l’ensemble correcte.
    C’est bien sûr une vraie aventure, mais beaucoup moins compliquée qu’on se l’imagine quand on part la première fois, je suis moi aussi passé par là ;o)
    Buen Camino.
    Pierre

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  2. Besoin de renseignements
    Bonjour,

    Nous allons faire une partie de cette route en partant de Poitiers nous allons nous baser sur votre expérience. Plusieurs questions : quel livre ou quelle carte me conseillez-vous? Où peut on trouver une crédential? A poitiers le chemin démarre d’où? Comment est-ce balisé? On prépare vraiment une grande aventure…Pardonnez nous si mes questions vous semblent stupides.
    Merci

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  3. RE : Ce n’est plus le même homme…
    Bonjour Roger.
    Merci pour tes encouragements. Je ne sais pas si je prends du recul ou si c’est simplement plus laborieux, mais je préfère ta version. Quand à la compagnie des autres si sur l’autre chemin il fallait de temps en temps s’isoler c’est vrai qu’ici on sent vite, dans la solitude, combien elle peut nous manquer.

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  4. Ce n’est plus le même homme…
    Bonjour Pierre.
    Ce n’est plus le même homme qui fait ce 2me chemin, en 2009 il prend du recul et semble rechercher plus la compagnie ,les échanges, laissant « l’exploit » en retrait et privilégiant la prise de notes afin de nous restituer un avancement détaillé et imagé (littéral, photographique, sonore).
    Pierre prends ton temps (mais pas trop) pour terminer avec cette qualité ce récit de voyage.
    Mon bon souvenir à Hélène.
    Roger.

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